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Fessenheim : l'Etat a mal calculé le coût de la fermeture, dénonce la Cour des comptes

Les magistrats financiers jugent chaotique le processus de décision qui a entraîné la fermeture de la centrale nucléaire alsacienne. L'Etat pourrait avoir à le payer cher, estiment-ils.

La centrale nucléaire de Fessenheim dont l'un des deux réacteurs vient d'être arrêté définitivement.
La centrale nucléaire de Fessenheim dont l'un des deux réacteurs vient d'être arrêté définitivement. (Sebastien Bozon/Afp)

Par Joël Cossardeaux

Publié le 4 mars 2020 à 18:07Mis à jour le 5 mars 2020 à 10:02

Attention virage dangereux. La fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim , dont l'un des deux réacteurs a été arrêté le mois dernier, marque un tournant dans la transition énergétique, mais la manoeuvre « risque d'être coûteuse pour l'Etat », estime la Cour des comptes dans un rapport rendu public mercredi après-midi. Le protocole d'indemnisation qu'il a négocié avec EDF, présente un « risque financier » à ses dépens estime la Cour.

« Processus de décision chaotique »

Les magistrats financiers recommandent en particulier de préciser les modalités d'application de l'accord conclu entre l'Etat et EDF par voie d'avenant. Ils imputent ses imperfections et son caractère déséquilibré au « processus de décision chaotique » qui a caractérisé cette fermeture. Sa signature par l'Etat et EDF ne date que de quelques mois - le 27 septembre 2019, exactement - mais pas moins de sept années séparent l'annonce de la fermeture de Fessenheim par François Hollande en 2012 et la décision de la fermer ne soit prise par Emmanuel Macron en novembre 2018.

Un temps long révélateur de « la difficulté pour l'Etat de concilier son rôle d'actionnaire majoritaire d'une entreprise publique et de responsables de la politique énergétique », pointe le rapport de la Cour des comptes, réalisé à la demande du Sénat. Toutes ces années passées pour en arriver à un accord qui « présente sur de nombreux points des risques de divergence d'appréciation ». Ceux-là mêmes qui pourraient coûter cher à l'Etat. Certaines dispositions de mise en oeuvre, concernant notamment les modalités de calcul des indemnités ou encore les clauses de rendez-vous réguliers, « mériteraient d'être précisées par avenant afin de limiter ce risque », estiment déjà les auteurs du rapport.

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Un « bénéfice manqué » au montant incertain

Ils s'expliquent tout aussi mal certaines dispositions, comme la durée de la période indemnisée. Elle s'étend jusqu'en 2041, « soit jusqu'à la sixième visite décennale de la centrale, alors qu'EDF prévoit dès aujourd'hui certains arrêts de centrales à leur cinquième visite décennale (soit après 50 ans de fonctionnement) », font-ils remarquer. Autre point sur lequel l'Etat n'est pas à son avantage, « le montant relatif au préjudice pour anticipation des dépenses postérieures à la fermeture est aujourd'hui évalué à 370 millions d'euros, mais pourrait s'avérer plus élevé en cas de paiement différé, compte tenu des taux d'actualisation retenus ».

Un dérapage incontrôlé à « plusieurs dizaines de millions d'euros » que la Cour propose à l'Etat d'éviter en versant dès 2020 l'intégralité de l'indemnité initiale négocié avec EDF. Mais ce sont surtout les modalités de l'indemnité à laquelle EDF peut prétendre au titre du « bénéfice manqué » que représente la fermeture de Fessenheim pour cette entreprise qui n'en est pas à l'initiative, sur lesquelles tiquent les juges. Les montants sont « très incertains car ils dépendent notamment des futurs prix de l'électricité et du mode de régulation du nucléaire », font-ils remarquer. Une part d'indemnisation sur laquelle l'Etat a, selon eux, intérêt à fixer un plafonnement.

L'Etat devrait en tirer les leçons pour se prémunir des risques futurs d'indemnisation liés aux fermetures qui vont suivre, nombreuses, sur la période 2030-2040, s'il souhaite tenir l'objectif d'un « mix » électrique où la part du nucléaire doit descendre à 50 % en 2023. Un « mix » dont il faut « mieux anticiper les évolutions », estime la Cour qui, à cette fin, recommande de porter à 15 ans la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).

Joël Cossardeaux

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