Fermeture de Fessenheim : une promesse qui a tardé

La fermeture définitive de la centrale nucléaire de Fessenheim, promesse de François Hollande puis d’Emmanuel Macron, aura lieu le 30 juin. Les travaux de démantèlement de la plus vieille centrale de France débuteront à l’été 2025. Retour en dates sur l’histoire de la doyenne des centrales françaises.

Après plus de quarante ans de service, la centrale de Fessenheim fermera définitivement le 30 juin 2020. Frederick Florin / AFP

1970 – 1977 : De la construction à la mise en service

 

La construction de la centrale débute en 1970. Située dans la commune de Fessenheim dans le département du Haut-Rhin, elle est à proximité de l’Allemagne et de la Suisse.Trois entreprises participent à sa construction : EDF, la société allemande Energie Bade-Wurtemberg, et un consortium suisse. Sept ans plus tard, ses deux réacteurs sont reliés au réseau électrique. Aujourd’hui, la centrale produit en moyenne annuelle l’équivalent de 80% de la consommation alsacienne.

Le nucléaire est la source principale d’énergie en France, avec plus de 70% de l’électricité nationale issue des 57 réacteurs. À elle seule, la région Grand-Est, où se situe la centrale de Fessenheim, a produit environ 23 % de l’énergie nucléaire en France en janvier 2020, selon le Réseau de transport d’électricité (RTE).

2004 – 2014 : Les incidents se multiplient

 

Dès le début des années 2000, les associations anti-nucléaires s’inquiètent du vieillissement de la centrale et de sa position en zone sismique.

Entre 2004 et 2014, ce sont 31 incidents qui ont eu lieu à la centrale de Fessenheim, selon Rue89. Un document de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), transmis à une députée écologiste allemande, fait état de dix-sept anomalies constatées sur le deuxième réacteur de la centrale, et de treize sur le premier.

En 2007, l’ASN dénonce, dans un rapport sur l’état des centrales, un  « manque de rigueur » de la part d’EDF dans l’exploitation de Fessenheim.

En avril 2014, le réacteur 1 est arrêté plusieurs semaines pour cause de fuite dans une tuyauterie d’alimentation en eau. Quelques heures plus tard, le deuxième réacteur est lui aussi mis à l’arrêt après la fermeture imprévue d’une soupape de vapeur.

2011 : Au lendemain de Fukushima

 

En mars 2011, à la suite de la catastrophe de Fukushima au Japon, les centrales nucléaires françaises sont soumises à des évaluations complémentaires de sûreté. A l’issue de ces contrôles, l’ASN classera les installations comme « satisfaisantes ».

Pourtant, l’hostilité de la population grandit, et les actions anti-nucléaires se multiplient. Le 22 mars 2011, les cantons suisses de Bâle Ville et Bâle Campagne demandent à la France de fermer la centrale, pour des contrôles supplémentaires après l’accident japonais. En juin, un collectif d’associations trinationales organise une chaîne humaine, rassemblant 5 000 personnes, pour réclamer la fermeture de Fessenheim. Mais en juillet, l’ASN annonce que la centrale pourra vivre encore dix ans, sous réserve de travaux.

2011 – 2017 : Le Parti socialiste promet la fermeture de Fessenheim

 

Le 19 novembre 2011, à quelques mois de l’élection présidentielle, le Parti socialiste et Europe Ecologie-Les-Vert se concertent pour former, en cas de victoire de la gauche, une coalition à l’Assemblée nationale. Ils concluent un accord prévoyant la « fermeture progressive de vingt-quatre réacteurs » (sur un total de 58 à l’époque) d’ici à 2025, dont « l’arrêt immédiat de Fessenheim ».

Après son élection, François Hollande promet que la centrale de Fessenheim fermera à la fin de l’année 2016. L’année suivante, l’Etat et EDF s’accordent pour une indemnisation de 489 millions d’euros. 950 salariés, dont 300 permanents, voient leur travail menacé. EDF doit alors officiellement demander au gouvernement l’abrogation de son autorisation d’exploitation. Une promesse que son PDG, Jean-Bernard Lévy, accepte de faire sous trois conditions. Entre autres, la prolongation du chantier de Flamanville et l’accord de la Commission européenne concernant les aides d’Etat.

Mais la date de la fermeture de la centrale est repoussée à 2018. François Hollande veut combiner l’arrêt de Fessenheim avec la mise en service de l’EPR de Flamanville, dont les travaux prennent du retard.

Depuis 2017 : La fermeture enfin confirmée

 

La fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim est une des promesses de campagne du Président de la République Promesse partiellement tenue d'Emmanuel Macron , qui confirme, une nouvelle fois encore, qu’elle sera liée à la création de l’EPR de Flamanville.

Fin mai 2018, EDF prévient que la date pourrait être repoussée à l’été 2019, face à la perspective d’un nouveau retard pour Flamanville. En octobre, le ministre de la Transition écologique François de Rugy bouscule à nouveau le calendrier. Son lien avec la construction de l’EPR est rompu, la centrale fermera avant la fin du quinquennat, en 2022.

La déclaration de mise à l’arrêt définitive est déposée le 27 septembre 2019, officialisant la fermeture des deux réacteurs de la centrale en 2020, comme prévue dans la programmation pluriannuelle de l’énergie. Elle planifie, entre autres, la réduction de la part du nucléaire à 50% d’ici 2035 (contre 70% actuellement), et le développement des énergies renouvelables.

Le 22 février, le premier réacteur est mis hors service, et l’arrêt du deuxième est prévu le 30 juin. Les effectifs seront réduits à 60 salariés d’EDF, et une centaine de prestataires permanents, en charge du démantèlement du site. Celui-ci devrait débuter à l’été 2025 et s’étendre jusqu’en 2040. Avant cela, des opération de pré-démantèlement seront engagées, comme par exemple l’évacuation de tout le combustible usé vers un centre de stockage. Une étape qui devrait s’achever en 2023.

Malgré la crise sanitaire due à la pandémie de Covid-19, les opérations de préparation de mise à l’arrêt définitive du deuxième réacteur ont été maintenues. Dans un communiqué paru le 30 avril 2020, EDF confirme que le délai sera tenu. La fermeture de la centrale aura donc bien lieu, le 30 juin prochain.

 

Brianne Cousin.

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