Vaccin contre le cancer du col de l’utérus : les gynécologues en guerre contre les fake news

Le vaccin contre le cancer du col de l’utérus fait l’objet de rumeurs contre lesquels s’insurgent les spécialistes réunis en congrès vendredi.

 Le Gardasil, l’un des deux vaccins existants contre le papillomavirus, est commercialisé dans une nouvelle version depuis le mois de septembre.
Le Gardasil, l’un des deux vaccins existants contre le papillomavirus, est commercialisé dans une nouvelle version depuis le mois de septembre. PHOTOPQR/Le Républicain Lorrain/Julio Pelaez

    C'est une mise au point aux allures de contre-attaque. À la veille de son 42e Congrès, et à quelques semaines du lancement du dépistage organisé, la société française de colposcopie et de pathologie cervico-vaginale (SFCPCV) s'inquiète de la prolifération de « fake news » sur la vaccination contre le cancer du col de l'utérus. À son origine, le papillomavirus (HPV), transmis lors des rapports sexuels, est responsable de 3000 nouveaux cas de tumeurs par an dans l'Hexagone, et plus de 1000 décès. « Depuis juin, et surtout la fin de l'année, des informations erronées et dangereuses circulent sur Internet et dans la presse, se désole son président Jean Gondry. Ils qualifient les vaccins anti-HPV, le Gardasil et le Cervarix, de bombes à retardement. C'est totalement faux! »

    Non, le vaccin n'augmente pas le risque de cancer

    Ces arguments fallacieux sont notamment véhiculés par deux médecins ces dernières semaines. « Ce ne sont même pas des gynécologues, tacle Jean Gondry, et pourtant ils affirment que dans certains pays, où la campagne vaccinale a été très large, le nombre de cancers a augmenté chez les plus jeunes. Ils manipulent les chiffres et leurs interprétations. »

    Au contraire, en Australie, où 80 % des adolescentes et 75 % des garçons sont immunisés, la proportion de jeunes femmes de 18 à 24 ans porteuses du papillomavirus a chuté de manière spectaculaire, de 23 % à 1 % en dix ans. En Angleterre et au Danemark également, où 70 % des jeunes filles sont immunisées, les lésions précancéreuses, qui apparaissent environ dix ans après une transmission du papillomavirus, sont en net recul.

    « Dans le reste de l'Europe, il n'y a pas de fake news! » appuie le docteur Jean-Luc Mergui, ancien président de la société française de colposcopie et gynécologue à la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Au contraire, chez nous, conséquence des polémiques, la vaccination ne prend pas. Pire, son taux, un des plus bas d'Europe, continue de baisser. « Les années suivant sa mise en place en 2007, on avait un taux de 30 %, aujourd'hui on est à 18 % », regrette Jean Gondry. Et le nombre de 3000 nouveaux cancers du col de l'utérus diagnostiqués chaque année ne bouge pas depuis les années 1980. Triste record.

    Non, il ne donne pas la sclérose en plaques

    Ces vaccins n'augmentent pas le risque de survenue d'une maladie auto-immune, comme la sclérose en plaques. C'est la conclusion d'une enquête, la plus vaste au monde sur ce point précis, menée auprès de deux millions de jeunes filles par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et l'Assurance maladie, et publiée en 2015. L'an dernier, une étude canadienne a confirmé l'absence de lien. L'ANSM relève toutefois une augmentation « probable », en France, du syndrome de Guillain-Barré, une grave pathologie neurologique inflammatoire, « de l'ordre de un à deux cas supplémentaires pour 100 000 jeunes filles vaccinées », sans remettre en cause le bénéfice de ces injections.

    Oui, il protège contre d'autres cancers

    Le papillomavirus peut aussi provoquer des cancers de la gorge, de la vulve, du vagin ou de l'anus. Il est à l'origine de 30 % des tumeurs des amygdales. « En France, ils augmentent d'ailleurs de façon spectaculaire, affirme Jean Gondry. Alors que la vaccination permet de s'en prémunir. » Le nouveau Gardasil 9, disponible en France depuis septembre, protège désormais contre 85 à 90 % des virus, responsables de ces cancers.

    VOUS AVEZ DIT PAPILLOMAVIRUS ?

    Très fréquents, les papillomavirus humains (HPV) regroupent dans leur famille plus de 180 types. Ils peuvent être bénins ou à hauts risques. Le préservatif ne protège pas à 100 % contre ces infections.

    80 % des femmes et des hommes sont contaminés deux ans après un premier rapport sexuel, 90 % l'éliminent naturellement en 24 mois grâce à l'action des anticorps. Il disparaît bien plus vite chez les hommes.

    Deux moyens existent pour agir. Depuis 2007, il est recommandé aux filles de 11 à 14 ans de se faire vacciner avant le démarrage de la vie sexuelle. Ces injections sont remboursées à 65 %. Enfin, un frottis est proposé tous les trois ans aux femmes de 25 à 65 ans afin de détecter un éventuel cancer du col de l'utérus. Dans quelques semaines sera lancé le dépistage organisé au niveau national. Celles qui n'ont pas fait de frottis durant cette période seront invitées, par courrier, à en réaliser un.