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« La Norvège n’est pas responsable des émissions de CO2 liées à l’usage de son pétrole »

Pour la première ministre norvégienne, Erna Solberg, dont le pays est le principal exportateur de pétrole d’Europe de l’Ouest, le One Planet Summit peut aider à combler le vide créé par le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris.

Propos recueillis par  et

Publié le 13 décembre 2017 à 10h13, modifié le 13 décembre 2017 à 10h38

Temps de Lecture 5 min.

La première ministre norvégienne, Erna Solberg, le 12 décembre à Paris.

La première ministre norvégienne, Erna Solberg, a participé, mardi 12 décembre, au One Planet Summit, le sommet sur le climat organisé par la France à l’occasion des deux ans de l’accord de Paris. La « pétromonarchie » nordique se veut en pointe dans la lutte contre le changement climatique, sans renoncer à l’exploitation de l’or noir.

Que pensez-vous du résultat du One Planet Summit ? Emmanuel Macron est-il devenu le principal leader de la planète sur le front de la lutte contre le changement climatique ?

Il y a actuellement un vide dans les relations internationales et je pense que Macron et les Chinois font un bon travail pour le remplir. C’est le résultat du retrait américain de l’accord de Paris et des organisations internationales. En Europe, le Royaume-Uni est concentré sur le Brexit et Angela Merkel sur la formation d’un nouveau gouvernement. Macron est un de ceux qui poussent en faveur d’un nouvel agenda. Nous n’avons pas besoin de nouvelles cibles mais d’actions, et c’est cela que je trouve intéressant dans ce sommet qui implique aussi la société civile.

La Norvège est-elle prête à compenser le départ des Etats-Unis de l’accord de Paris et son arrêt du financement du Groupement d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ?

Nous faisons partie des plus gros soutiens du GIEC, mais nous ne pouvons pas combler toutes les lacunes des Etats-Unis. Nous sommes un petit pays.

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Votre pays porte un message très ambitieux sur le changement climatique tout en étant le principal producteur de pétrole d’Europe de l’Ouest. N’est-ce pas contradictoire ?

Le pétrole et le gaz font partie de la solution à moyen terme sur le changement climatique. Le sujet, c’est d’en produire en émettant le moins de CO2 possible. Et la Norvège est très compétitive de ce point de vue. Mais bien sûr, la consommation de pétrole va baisser. C’est évidemment un risque pour notre économie, c’est pourquoi nous nous employons à la diversifier.

Mais vous continuez de lancer des nouveaux programmes d’exploration pétrolière en Mer de Barents, au nord, malgré l’opposition des ONG qui vous poursuivent en justice...

C’est la première fois que la justice va se pencher sur une question constitutionnelle concernant notre politique pétrolière. Je préfère attendre son jugement. Mais en tant qu’ancienne députée, je pense que les ONG utilisent un cadre qui ne fonctionnera pas pour leurs objectifs. Le pétrole et le gaz ne sont pas inconstitutionnels ! Et selon notre Constitution, c’est au Parlement d’interpréter la Constitution sur une telle question…

Nous avons ouvert ces nouveaux lots d’exploration avec des garde-fous environnementaux très stricts, les plus stricts du monde. Si nous sommes responsables des émissions de CO2 de la production du pétrole, nous ne sommes pas responsables de celles de son usage. Et si nous arrêtions d’en produire, nous serions probablement remplacés par des concurrents qui émettent plus de CO2 que nous.

Votre propre gouvernement de coalition comprend un parti populiste, le Parti du progrès, qui ne croit pas au changement climatique…

Ce n’est pas vrai ! Certes, il y a des membres de ce parti qui n’y croient pas, mais le programme du gouvernement est très clair sur ce point.

Ces dernières années, beaucoup de vos voisins nordiques ont dénoncé des tentatives de déstabilisation venant de Russie par le biais de l’envoi de migrants. Est-ce aussi votre cas ?

Nous ne pensons pas qu’il y ait eu des tentatives de déstabilisation concertées. Des migrations ont certes été organisées par des passeurs avec probablement l’aide de personnes gagnant de l’argent sur la route. Mais quand nous avons commencé à travailler avec les autorités russes, cela s’est arrêté. Ces passages n’étaient pas forcément dans leur intérêt, ils ont leurs plus grandes bases sous-marines dans la région − je ne pense pas qu’ils apprécient d’y voir passer des personnes non contrôlées. Il y a au moins deux, si ce n’est pas trois postes de contrôle du FSB [les services de sécurité russes] avant d’arriver à la frontière…

Qu’ont-ils demandé en échange de l’arrêt de ces trafics ?

Rien. Nous leur avons simplement dit que nous allions renvoyer les migrants, nous avons réglé cela à un niveau diplomatique.

Avez-vous observé la propagation d’informations bidon venues de Russie comme vos voisins, notamment la Finlande ?

Nous avons vu des informations bidon en Norvège, mais nous n’avons pas trouvé de lien direct avec la Russie. Je ne pense pas que la Norvège soit une cible attractive pour eux.

Lire notre enquête : Article réservé à nos abonnés La Finlande, à l’avant-poste face à la Russie

La Norvège peut-elle être un modèle pour le Royaume-Uni après le Brexit ?

Si le Royaume-Uni veut quitter l’Union européenne pour en finir avec la libre circulation des personnes, alors le modèle norvégien n’est pas le bon. Du fait de son appartenance à l’Espace économique européen [qui garantit le marché unique], la Norvège doit en effet s’adapter aux directives de Bruxelles. Je ne pense pas que les électeurs britanniques aient voté pour ça.

Est-ce que le royaume peut un jour faire partie de l’Union européenne ?

C’est très difficile de l’envisager. Même si, en tant que cheffe du parti le plus pro-européen du pays, je le regrette… Cela n’empêche pas que notre pays a un rôle important à jouer. A Bruxelles, on me dit souvent que la Norvège apporte un soutien plus fervent à l’UE que certains de ses propres membres ! Notre petit pays a besoin de l’UE pour bien fonctionner.

Pour la première fois de l’histoire du pays, la Norvège compte trois femmes aux trois postes les plus importants : première ministre, ministre des affaires étrangères et ministre des finances. Que représente le leadership féminin pour vous ?

Je ne suis pas de celles qui pensent que si seules les femmes étaient aux commandes, le monde serait en paix. Mais si 50 % de la population ne participe pas à la vie politique, ce sont 50 % de talents qui sont gâchés. La Norvège affiche un taux élevé de participation des femmes dans la vie active [plus de 75 % aujourd’hui, seize points au-dessus de la moyenne des pays de l’OCDE]. C’est encore un défi dans nombre de pays européens d’avoir une famille et un travail en même temps, pas en Norvège.

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