Billet de blog 23 mars 2013

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Zones d’ombre sous le soleil éblouissant d’Iter !

Environ 3000 ouvriers « low cost » attendus sur le chantier pharaonique d’ITER qui vont être traités comme des esclaves d’un autre âge. L’enquête que nous vous proposons ici comportera plusieurs volets. Nous  présentons aujourd’hui une vue d’ensemble des pratiques scandaleuses et révoltantes entourant ce gigantesque projet. 

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© DR

Environ 3000 ouvriers « low cost » attendus sur le chantier pharaonique d’ITER qui vont être traités comme des esclaves d’un autre âge. L’enquête que nous vous proposons ici comportera plusieurs volets. Nous  présentons aujourd’hui une vue d’ensemble des pratiques scandaleuses et révoltantes entourant ce gigantesque projet.

L'objectif du projet ITER

Nous rappelons que l’objectif du projet ITER, implanté sur le site CEA de Cadarache (Bouches-du-Rhône), est de démontrer la possibilité scientifique et technologique de la production d'énergie nucléaire par la fusion d’atomes légers (hydrogène), réaction produite dans les étoiles qui libère leur énergie (chaleur, lumière, neutrons).

http://www.futura-sciences.com/fr/definition/t/physique-2/d/iter_4257/

Le Dumping social, esclavage moderne :

Le détournement des fonds publics à l’occasion de projets prestigieux annoncés par les États, est un des aspects du dumping social que l’on retrouve partout. Exemple en Pologne où des Chinois se sont fait exploiter pour la construction d’une autoroute, « 1300 Chinois qui travaillent, jour et nuit, 7j/7, 12 heures par jour » ; un travailleur raconte qu’il ne sait pas combien il va gagner, l’argent doit lui être versé directement en Chine, « En Pologne on n’a pas besoin d’argent, on est logés, nourris ». Ils mangent une bouillie de riz avec quelques fruits (jujubes) préparée par des cuisiniers chinois, dans un garage transformé  en cuisine.» (AFP 26 mai 2011)

Analyse de ce fléau :

Il suppose la mise en place d’une organisation du travail choisie délibérément, de sous-traitances en cascades et de cascades de sous-traitance, ce qui multiplie les conflits d’intérêt et les délits de marchandage.  Cette organisation du travail engendre la surexploitation des travailleurs, pouvant aller jusqu’à des situations d’esclavage, qui laissent les chômeurs locaux sans débouché, à la charge de la société. Les cotisations sociales ne sont pas payées, et ainsi  détournées pour alimenter les dividendes des actionnaires des grands groupes du bâtiment et travaux publics (Bouygues, Eiffage, Vinci)  et des patrons mafieux. Ces pratiques sont nuisibles à l’ensemble des travailleurs (travailleurs actifs, chômeurs et retraités), puisqu’elles privent de financement l’URSSAF, donc les caisses de solidarité : Sécurité Sociale (Assurance Maladie, accidents, retraites), chômage, 1% logement, etc.

Ce phénomène sévit partout, qui plus est dans notre région PACA, à deux pas de chez nous.

Depuis 2000, sur le centre de Cadarache, trois réacteurs sont successivement mis en chantier avec la même utilisation du dumping social.

Réacteur RES, destiné à l’expérimentation spécifiquement militaire,

Réacter RJH, Jules Horowitz, destiné  à la fabrication de radio-isotopes dans le domaine médical,

ITER, réacteur d’expérimentation de la fusion nucléaire.

Rien de nouveau sous le soleil d’ITER :

Pour le chantier ITER, par exemple,  il en va de même : on ne peut que s’étonner d’une récente signature de convention de soi-disant bonne pratique intitulée pompeusement « convention de partenariat pour la lutte contre le travail dissimulé sur le site ITER », signée entre MM Osuma Motojima, directeur général de l’organisation ITER et Dominique Clément, directeur préfigurateur des URSSAF de la région PACA. Cette convention met en place un calendrier et un délai de prévenance interdisant tout contrôle inopiné des inspecteurs de cette administration.

Sachant que la mission de l’URSSAF consiste, dans le cadre du financement du régime général de la Sécurité Sociale et de nombreux partenaires, à collecter les ressources (cotisations et contributions sociales) qui permettent notamment de financer la prise en charge ou le remboursement des soins médicaux, d’indemnités en cas d’arrêts maladie, de congés maternité ou d’accidents du travail ainsi que le paiement des retraites de base et des allocations familiales des bénéficiaires du régime général de la Sécurité Sociale.

Sachant que le réseau des URSSAF cherche à concilier un haut niveau de recouvrement et la démarche d'accompagnement des entreprises, notamment celles qui rencontrent des difficultés financières et que sa stratégie est fondée sur le développement de la qualité de la relation et du service au bénéfice de 9,5 millions de petites, moyennes ou grandes entreprises, associations, collectivités territoriales, particuliers employeurs, travailleurs indépendants et plus de 800 partenaires pour le compte desquels il recouvre des contributions.

Sachant qu’il garantit l’égalité de traitement de l'ensemble des cotisants et qu’il participe activement à la lutte contre la fraude et l'évasion sociale.

Cette mission apparaît en complète contradiction avec la signature d’un tel document.

Il se trouve qu’un guide du logement à destination des entreprises du chantier ITER, commandé par le CEA et l’Agence ITER France, édité par Sémaphores en juin 2012,  répertorie les possibilités de logement pour environ 3000 travailleurs bon marché, en quelque sorte « low cost », dont la venue a été confirmée lors d’une réunion de la Cli ITER  (Commission Locale d’Information), le 19 octobre 2012 à Vinon s/Verdon (nous reviendrons longuement sur la question de l’hébergement des travailleurs « low cost » sur la zone de Cadarache et ses environs, qui pose de graves problèmes d’infraction au Droit du Travail et aux Droits de l’Homme).

Quel est le rôle d’une telle convention sinon organiser l’impunité ?                                                                                                                                          

Cette convention  programme les dates exactes, des éventuelles visites des inspecteurs de l’URSSAF, ce  qui laisse tout loisir aux patrons du chantier d’aligner les arrivées et les départs des travailleurs, soit disant en « détachement transnational », avec  les contrôles non inopinés des inspecteurs des URSSAF. En clair  les dirigeants exigent des contrôles à leur bonne convenance, qui seront effectués quand ils disposeront d’une situation préétablie comme non sanctionnable,  ce qui permet aux patrons d’ITER d’annoncer sur leur site qu’ils ont signé une convention de lutte contre le travail dissimulé, (qui est sanctionnable et  pénalisable au titre du code du travail selon les articles :  L  8221-1,L 8221-3,L 8711-1,L8771-2,L 8224-1 ,L 8224-3).

Autres conséquences catastrophiques du dumpig social :

- Les Non-retombées économiques :

            •           Les chômeurs locaux resteront donc  sans débouché et sans perspective d’avenir : selon la plaquette de juillet de pôle emploi de Manosque, aucune offre d’emploi destinée au chantier n’est répertoriée.

           •           Les prélèvements sociaux destinés au logement n’étant pas prélevés (dans le cadre du 1% logement), cela aura un impact négatif sur le financement d’habitats sociaux, (collectifs et individuels) et la population de la région sera donc pénalisée parce qu’il n’y aura  ni construction de logements sociaux, ni participation au financement de l’habitat individuel.

- Montée de la violence inter-ethnique : les chômeurs locaux sans débouché risquent de s’opposer aux travailleurs “low cost”, ce qui fera monter immanquablement la violence inter-ethnique, sur et au-delà du chantier. Les pauvres se battront les uns contre les autres au lieu d’unir leurs forces pour changer les choses.

- L’injustice sociale généralisée mise en œuvre avec la complicité des services de l’État démontre qu’il n’existe plus aucun rempart de protection des conquêtes sociales des citoyens et de leurs droits.  L’inspection départementale du travail n’a visiblement pas dressé de procès-verbal suite à l’enquête qu’elle a réalisée en 2010, sur les nombreuses infractions liées au dumping social, découvertes et dénoncées par quelques militants de la CGT sur le chantier RGH. La signature de partenariat de la direction d’ITER avec l’URSSAF en est un exemple scandaleux.

            •           Malgré une petite poignée de militants CGT, surnommés « les petits copains », acharnés à lutter contre le dumping social, les organisations syndicales du centre de Cadarache sont étrangement devenues de grandes muettes aveugles et sourdes (l’Union Locale CGT de St-Paul lez Durance, inaugurée en 2005 par Bernard Thibault et spécifiquement créée pour le chantier ITER, a fermé son local en mai 2012).

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